C'est par hasard que j'ai
découvert l'album du jour. Traînant chez un disquaire connu, je
feuilletais un de leur magazine gratuit. Au milieu des sorties du
mois de Mai, un mini-article vantait les mérites de Richard Hawley
en ces quelques termes : « […] sa voix de dandy se
mêle aux guitares psychédéliques, ses compositions gagnent en
profondeur. Magistral. » Il
n'en fallait pas tant pour que j'en soit des plus intrigué. Je me
méfie souvent des nouveautés mises en avant dans de pareils
ouvrages, car la déception est souvent au rendez-vous, les
superlatifs n'étant jamais assez nombreux pour faire acheter. Peu
importe, je me procure Standing At The Sky's Edge. La suite relève
de la claque musicale.
Je
n'ai que trop rarement entendu en seulement neuf chansons autant de
densité sonore et de qualité musicale lié à un tel style. Autant
commencer par le début, premières seconds d'écoute et déjà
première gifle. L'introduction de « She Brings The Light »
débute lentement, quelques cordes se frottent puis vient le vent
d'un violon. L’ambiance est déjà installée, nous sommes avant
l'orage et l'air nous oppresse. Attention, il s'agit de cette
oppression que l'on sait qu'elle débouchera sur une libération
jouissive, et ici, l'orage tombe avec cette avalanche de guitares
saturées telle la pluie après des heures de chaleur sans air. En
plus d'être musicale, je veux bien faire comprendre que cette claque
est presque physique, et que ce relâchement, cette déferlante se
ressent au plus profond de nous même et nous procure un bien fou. Ce
sentiment se répète bon nombre de fois durant toute l'écoute de
l'album. A chaque fois, on se laisse impressionner par la qualité du
changement de rythme et de cette tornade musicale qui nous transporte
loin, très loin... Parfois même, alors que vous serez encore sous
le choc de la première lâchée de son, vous tombera et s'enfoncera
au plus profond de vos tympans un solo encore plus percutant. C'est
en quoi cette première chanson est une parfaite intro, elle comporte
tout ce que l'album aura de meilleur en condensé. Cela ne veut pas
dire qu'il s'agit du meilleur morceau, car développer toutes ces
parties tient tout d'abord du bon goût et surtout d'une grande
ingéniosité.
Une
des grandes réussites de cet album est d'avoir lié plusieurs
chansons ensemble. J'apprécie ce procédé qui nous plonge dans deux
univers successifs mais avec une continuité au niveau des paroles
et donc de « l'histoire » racontée. Richard Hawley
l'utilise à deux reprises en suivant le même modèle, à savoir
qu'il lie une chanson aux sonorités plutôt proches de la Folk douce
à une chanson à la suite totalement ancrée dans le Rock
psychédélique. On a donc le très planant « Time Will BringYou Winter » suivi du redoutablement rythmé « Down In The Wood » ainsi que le très fragile « The Wood
Collier's Grave » suivi du sublime et sans aucun doute
meilleure chanson de l'album, peut être même meilleure chanson Rock
de 2012 pour le moment, j'ai nommé « Leave Your Body Behind You ». D'ailleurs, pour réellement apprécier les deux
morceaux plus mouvementés, il est nécessaire d'en passer par ceux
qui les précèdent, car en plus de respecter l'ambiance souhaitée
et mise en place par Richard Hawley, vous prendrez plaisir à prendre
une secousse monumentale au passage des deux univers.
Musicalement
parlant, l'ancien membre des Pulp s'ouvre à trois grands thèmes :
le Rock, le Rock psychédélique/planant et la Folk. Avec ces trois
thèmes il compose, parfois en les mélangeant dans un même morceau,
des petits bijoux à écouter sans modération.
Je
vais commencer par la Folk, car après avoir vanté la qualité de ce
8ème opus à vous secouer, il faut aussi savoir qu'il sait aussi
être calme et reposant. L'emplacement au sein de l'album des deux
morceaux est parfait, ils se trouvent entre les deux doublettes de
chansons, moteur de l'album. Pris entre deux turbulents orages, nos
deux chansons Folk font leur travail d’apaisement avec brio. La
première, « Seek It », me fait penser à Johnny Cash
dans la façon de chanter et Bob Dylan pour la musique que je trouve
très proche de « Like A Rolling Stone ». Un ton léger
sur une musique légère pour parler d'amour, rien de tel pour se
poser après la course poursuite imposer par « Down In The
Wood ». Ensuite vient se glisser le doux-amère « Don't Stare At The Sun ». Le premier nom qui m'est venu en tête lors
du passage du morceau est Alain Bashung. L'ambiance y est pour
beaucoup dans cette vision de notre regretté Bashung, le doux-amère,
la voix calme et posée et même dans ce lancinant solo de fin, d'une
rare qualité de part son coté ultra-mélodique, j'ai cru entendre
« La Nuit Je Mens » de Monsieur Bashung.
Je ne
reviendrai pas sur les morceaux Rock que sont « She Brings The
Light » et « Down In The Wood » par contre c'est au
travers du coté Rock psychédélique/planant dont font partie
« Leave Your Body Behind You », « Time Will Bring
You Winter » et « Standing At The Sky's Edge »
j'aimerais apporter une mention spéciale au chant et à la voix
splendide de Richard Hawley. Je ne taris pas d'éloge à l'encontre
de « Leave Your Body Behind You » qui se permet même des
chœurs en fin de morceaux pour mettre en valeur la voix de R.H. Mais
c'est bien au travers de « Standing At The Sky's Edge »
que l'on prend la mesure du personnage. Au delà d'un texte superbe,
on imagine clairement cette voix sortir du ciel comme un rayon de
lumière d'entre les nuages noirs. La réverbération y est pour
beaucoup et Hawley ne lésine pas sur les effets pour arriver à
ciseler ses sublimes ambiances. L'image du rayon de lumière
transperçant les nuages ne m'aura jamais quitté de tout l'album,
une telle profondeur dans la voix me fait toujours penser à une
sorte de hauteur de la part du chanteur, puis cette la notion de
« Sky's Edge » me fait penser au Tout Puissant.
Pour
finir, « Before » est une synthèse de l'album. Au même
titre que « She Brings The Light » était une
introduction réussie, « Before » clos l'album avec
classe. Reprenant successivement chaque style utilisé tout au long
de l'album, j'ai encore pris une claque lors de la transition
Folk/Rock qui tombe à point nommé pour glisser sur le planant final
au son de la grave voix de Richard Hawley.
J'ai
adoré cet album. Bien plus qu'un amas de bonnes chansons, Richard
Hawley a réussi à les assembler de telle façon qu'elle nous offre
un récit construit et agréable aux oreilles. Un autre ordre
pourrait, sans le rendre banal, le rendre bien moins attrayant. C'est
vraiment ce que j'aimerais retenir : il s'agit d'un des albums
les mieux ficelé de 2012. Car en plus d'avoir de l'inspiration et de
la qualité dans la musique, les moindres détails ont été
travaillés, jusque dans l'ordre des chansons. Chose sur laquelle peu
d'artiste se pose des questions, pourtant le résultat est là. Le
travail paye toujours, Richard Hawley et Standing At The Sky's Edge en
sont la preuve.
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