samedi 24 mars 2012

Running Still - Charlie Winston


Deuxième opus de Charlie Winston, « Running Still » peut il faire naître pour son interprète le même engouement qu'avait créé son prédécesseur ? Alors que « Hobo » avait littéralement envahi les ondes et les chaînes musicales au point de me dégouter du personnage et de sa musique. C'est donc avec une certaine appréhension que je m’apprêtais à écouter ce nouvel album.


Force est de constater qu'à la première écoute on reconnaît, presque trop, la patte Winston. A bien le réécouter, on s’aperçoit alors qu'il y a des rythmes de guitares à quatre accords, une section rythmique ultra présente, un harmonica et une voix qui chante/parle : bref, tout le mélange qui avait fait cartonner son grand frère « Hobo »... mais pas seulement, loin de là.


Je ne m'attarderai pas sur le single « Hello Alone ». Mise à part la réalisation du clip par Andrew Gura qui nous gratifie d'un superbe rendu photographique (oui C.W est beau, a un style « inassumable » pour le commun des hommes, et fait rêver toutes les demoiselles levant les yeux sur lui, ce n'est pas le sujet !) et d'une guitare trempée au grand dam de tous les puristes de l'instrument, ce single s’inscrit dans la suite du précédant album.
Car si les trois premières chansons reprennent la bonne vieille recette de 2009, s'en suit le Winston Nouveau, ou tout du moins, le Charlie Winston qui libéré des contraintes budgétaires et radiophoniques, tente, ose et essaye ce qui lui plait, qui laisse vivre son âme d'artiste touche à tout. Et ça marche. Charlie Winston livre un album bourré de références, avec des titres profonds et tendres à la fois. Le titre titre « Wild Ones » est une mise en abyme de cet album. Profondément ancrée dans son style, l'intro n'inspire rien de nouveau ; mais à peine le refrain entamé, les arrangements très fins et efficaces, sur lesquels je reviendrai plus en détail, font naître une envie de danser à la façon de « Lonely Boy » des Black Keys. Et surtout, on ressort du morceau en se demandant ce que l'on vient d'écouter (et de faire si l'on s'est mis à danser !)
On sort de l'album avec ce même sentiment.
Tout d'abord, C.W use du piano bien plus qu'avant, et c'est un réel plaisir que d'écouter des morceaux avec cette dominance piano/voix comme « The Great Conversation », « She Went Quietly » ou encore « Making Yourself So Lonely ». La première est une sorte de transition entre les deux albums, car même si « Speak To Me » est osée dans sa fabrication (Winston n'a utilisé que sa voix pour instrument) on reste vraiment (trop) proche de ce que l'on nous a rabâché durant les trois dernières années. Cette « Great Conversation » se tient donc sur les accords de « Moonlight Sonata » de Beethoven, et il en profite pour remercier toutes ses inspirations : nous les remercions aussi pour le résultat. Ce passage indique une suite bien plus reluisante que ne l'avait laissé espérer le très formaté « Where Can I Buy Happiness ? ».
Les morceaux passent et l'on prend plaisir à entendre la puissance des arrangements qui se développent tout au long d' « Unlike Me ». Cette chanson est des plus épurées, mais l'utilisation du xylophone la rend émotionnellement très prenante : cela n'est pas sans rappeler l’usage que les RHCP ont fait de cet instrument dans « 21st Century ». Les arrangements prennent aussi la forme de claviers « à la » Muse sur « Making Yourself So Lonely », et rajoutent sans conteste une profondeur à cette chanson d'amour perdu, ainsi qu'une sorte d'étourdissement qui accompagne si peu souvent ce genre de chanson.


Au delà de ces morceaux plus doux, l'album est dans l'ensemble plus musclé que le précédent, tout en gardant une cohérence avec le reste des chansons proposées. On a pourtant l'impression que « Rockin'In The Suburbs » ou autre « Until You're Satified » sont plus là pour tenir un numéro de plus que pour apporter une plus-value à cet opus, qui auraient mérité soit d'être mieux travailler soit de faire différents choix sur leur orientation musicale. « Until You're Satified » se cherche entre une guitare presque funk, un rythme pop et une basse très grasse... Ceci dit, ces titres seront efficaces en radio et chez toute personne cherchant à sortir du lit de bonne humeur.
L'idée de laisser planer les morceaux sur la fin, qu'ils soient posés ou secoués, est plus que réussie. Reprenant les basiques des meneurs du genre on entendrait presque le très médicalement reconnu « Teardrops » de Massive Attack à la sortie de « Summertimes Here All Year ».
Il serait injuste de réduire cette dernière à un semi-plagiat tant le texte est engagé et puissamment servi par une musique planante. A propos des textes, Charlie Winston se désolait, en souriant, dans une interview à « 3ème Gauche » que le public Français ne puisse pas plus entrevoir la profondeur de ses textes (Il est vrai que pour la plupart d’entre nous, nous chantons anglais avec la bouche pleine de marshmallow...) Et c'est bien dommage, car cet album, bien plus centré sur lui et sur une rupture difficile, fourmille de petites perles que la pop/folk/rock a oublié de pondre depuis quelques années. Le meilleur exemple reste lorsqu'il donne sa voix pour faire parler les autres : le texte de « Lift Me Gently » donne des frissons de part sa noirceur calfeutrée dans un écrin d'arpège de guitare sèche. (Bizarrement, la ballade cachée de l'album éponyme des Libertines m'était venue à l'esprit à la première écoute).

L'espace de quelques écoutes et d'une interview, Charlie Winston m'a (re)conquit avec un album ayant su évoluer vis à vis du premier née de la famille Winston. Cet album charme plus par ses ballades et autre piano/voix que par son côté explosion de son. Un album qui donne envie d'écouter le prochain et surtout de voir Charlie sur scène pour voir comment il arrange toute l'émotion contenue dans son album face à la foule. Car plus important que l'album, la scène reste pour moi le plus important dans le monde de la musique. On ne peut exister en dehors de la scène. Il ne reste plus qu'à espérer que le rouleau compresseur qu'est le monde de la musique industrielle nous laisse apprécier cet album en paix en évitant le gavage et en distillant les petites perles de Running Still.


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